Forêt-Noire en bouteille... épilogue
Bonjour,
Comme je l'écrivais précédemment, la Forêt-Noire a (heureusement) su diversifier son savoir-faire en dehors des bons gâteaux crémeux, des coucous ridicules et du non moins discret et seyant Bollenhut.
Le vignoble du Bade s'étend entre la vallée du Rhin et la Forêt-Noire, sur près de 130 kms. Une région plus arrosée que l'Alsace, dont les meilleurs vins sont naturellement issus des versants orientés sud.
L'autre particularité veut que les "bons vins" soient aussi originaires des terroirs majoritairement volcaniques, alors que le loess compose la majorité des terroirs exploités.
On y cultive principalement du spätburgunder (ou pinot noir en français), müller-thurgau (du nom du prof qui l'a mis au point), grauburdunger (pinot gris, véritable spécialité du Bade).
La route (principale) des vins badois démarre à la sortie de Baden-Baden, pour se terminer, en pointillés, aux portes d'Offenburg (une cinquantaine de kms balisés, avec les discrets panneaux ci-dessus). Elle a, par endroits, de quoi faire pâlir notre belle route des vins d'Alsace...
Le vignoble badois quant à lui, s'étend de Weinheim au nord, jusqu'aux rives des lacs de Constance et du Bodensee, au sud.
Dans beaucoup de pays (de tradition viticole) visités, je commence souvent par acheter du vin en supermarché.
Histoire de situer "qualitativement" les daubes "petites expressions" disponibles en GMS (et inconsciemment, pouvoir comparer avec celles de nos "têtes de gondoles"). Ensuite, j'écume les cavistes, piochant dans l'offre locale disponible.
La différence qualitative n'était, pour une fois, pas super franche entre les deux sources (sur la même gamme de prix).
J'oserais même dire que les vins goûtés en supermarché n'avaient même pas à rougir face à ceux testés chez les cavistes. La majorité des vins coûtent entre 5 & 10 € (guère plus au supermarché). Quelques cuvées de luxe flirtent avec les 20 € chez les cavistes.
J'ai démarré mon apprentissage local par les rouges. J'ai assez rapidement renoncé à ces derniers. En effet, les différents spätburgunder dégustés étaient souvent de grosses caricatures bourguigno-alsaciennes, très boisées, extraites au possible.
Par exemple, "Cuvée Noire" 2008 Königschaffausen (6,40 € en supermarché), s'ouvre sur un joli nez de pinot, puis laisse la place à un boisé outrancier se déclinant sur le caramel et le brûlé. L'attaque est suave, sucrée, finement acide, développant fruits rouges, poivre, avec une amertume finale marquée assez désagréable. *(*)
J'ai bu d'autres rouges au restaurant, assez semblables à ce dernier...
Aussi, les blancs ont occupé l'essentiel de mon carnet d'alcoolique de vacances. J'ai principalement bu des vins classés "kabinett" (voir la hiérarchie des six "pradikate"), essentiellement "trocken" (secs).
Rivaner Kabinett 2011 - Kilian Hunn
Le rivaner est l'autre nom du müller-thurgau. Bu dans une agréable brasserie de Freibourg, ce blanc perlant avait des accents de sauvignon variétal évidents, compensés par un fruité puissant. Étonnante schizophrénie, qui ne sera pas le dernière du séjour. **
Alde Gott 2010 - Winzer cG - Weissburgunder Kabinett Trocken (5,50 € caviste)
Un pinot blanc à l'expression très "melon de Bourgogne", fruitée, sur la poire et le bonbon anglais. Matière très perlante, toujours sur le bonbec Albion. C'est court, peu complexe, un poil sucré, tendre et "peu naturel". *(*)
Un riesling "trocken", bu à Baden-Baden (dans une salon de thé, pas de référence supplémentaire) à l'expression très citrique, fruitée, louchant aussi vers le melon et/ou l'aligoté.
Un autre riesling de Gengenbach (bu à la MartinSkappel), avait aussi cette expression ligérienne très marquée.
Pas mal de "Blanc de noirs" sont disponibles. Le style "bourguignon" (quelque soit le cépage d'ailleurs) est souvent revendiqué.
Le Blanc de noirs (4 photos au-dessus) de Glottertaler 2010 (6,40 € en supermarché), proposait un joli nez de "boisé bourguignon", virant brusquement sur le chenin avant de s'installer dans le squelette olfactif du riesling. Une attaque acidulée, très fruitée, citrique, riche, grasse, un poil soufrée.
Là encore, on ne peut s'empêcher de penser, face à cette vivacité, à un muscadet de bonne qualité, bien élevé. **(*)
Oberkircher - Winzergenossenschaft - Riesling Kabinett Trocken 2009 (7-8 € caviste)
Un nez ligérien, matiné d'hydrocarbures, "caillouteux" qui se fixe sur le riesling attendu. Une attaque pétrolée, fruitée, vive, éthérée, pleine, fraîche, aux amers relevés, à la finale tonique de pamplemousse. **(*)/***
Riesling sekt brut 2008 - Oberkircher (10,90 € caviste)
Une première pour moi, partagée avec mes collègues de goulot du Centre So et Jull, que ce riesling pétillant. Très belle robe vieil or, fines bulles comme je les aime, très légèrement pétrolée, au très fin sucre, à la fine amertume. Une jolie bulle de soif, évoluant agréablement au fil de la dégustation. ***
Au final, des "petits vins" à la complexité limitée, tout en fruits, sans sucres traînants, aux degrés digestes.
Il n'atteindront sûrement jamais la notoriété de leurs prestigieux (et onéreux) voisins mosellans, mais sont d'un rapport qualité/prix juste.
Mes maigres références gustatives conduisant à faire souvent un parallèle avec cette singulière expression "ligéro-alsacienne" (je parle des blancs uniquement), intéressante, assez bien conduite quand elle s'affranchit de loucher maladroitement sur ses voisins d'outre-Rhin.
J'ai même dégoté un auxerrois chez un gros caviste de Villingen, plus deux-trois autres breuvages chez le principal dealer de Schönwald. A découvrir au calme à la maison, ou chez d'autres amateurs...
Les rouges gagneraient aussi à se "déboiser partiellement", quand on devine le joli potentiel fruité, parfois perceptible, derrière les nombreuses menuiseries liquides proposées.
Des vins forcément introuvables en France, mais que les frontaliers suisses et alsaciens peuvent dégoter sans mal, juste en traversant le Rhin.
Zi inde...