Les Vendredis du Vin #51 : des vins vivants pour fêter la mort !
Bonjour,
51 ème rendez-vous des VdV, avec au pupitre, Olivier Lebaron dans le rôle du chef d'orchestre.
Le Showviniste du sud nous propose une thématique "vivante d'outre-tombe", pour ce vendredi où nous fêtons les André ("à la Saint-André si tu entres dans un troquet, tu sortiras 02h00 plus tard bourré comme une urne de l'UMP").
(crédit Rémy Bousquet)
Le sieur Lebaron nous invite "à faire partager le vin du dernier festin. Quel serait l’ultime vin à retenir ? Avant un dernier souffle, quelle serait votre dernière gorgée ? Aurez-vous le vin gai ou le vin triste ? Serez-vous seul ou accompagné ? Et si cette fin vous effraie, passez donc à l’étape d’après et imaginez le vin de vos funérailles, qu'aimeriez-vous laisser dans votre cave pour arroser vos amis ?"
(crédit Rémy Bousquet)
Nous sommes en 2075. Je viens de fêter mes 107 ans et ne sais toujours pas ce que l'expression à la con : "j'vais pas attendre 107 ans", signifie !
Tous les matins, depuis désormais près de 70 ans, je consulte les blogs dédiés au vin. Ils se font rares depuis 2 décennies.
Les dinosaures de la blogosphère ont presque tous disparu. Ne reste plus que Bourgogne Dead, animé par la 3ème génération Desperriers-Ibanez, ainsi que No Wine is Alive coaché par Byron Iommi-Amunatéguy et Zoubir Audouze (oui, oui, le prénom Zoubir est devenu très tendance dans les années 2060, comme quoi, tout arrive !!).
(source tronches de vin)
Olif nous a quitté à la fin des années 60. Le chantre du vin vivant s'est éteint tranquillement dans son Jura natal. On raconte qu'il a même reçu l'extrême-onction du neveu du petit-fils de Bettane en personne (à la tête de la Fondation MB pour "Mieux que Bio") !!
C'est dans un cercueil en épicéa, renforcé par des clavelins, que le porte-voix des vignerons natures a rejoint le caveau des "héros du jaja" (une sorte de Panthéon pour alcoolos). Ses derniers mots furent "chardoglou, plouglou, savaglou..." agrémentés de deux filins de bave, naturellement sans soufre...
Son petit-neveu Donovan Big John a tenté de reprendre le flambeau, mais a rapidement décrédibilisé le blog historique, en s'associant avec le groupe Castel lors du lancement d'un vin "bio", selon les critères de la 115 ème réforme du cahier des charges européen du vin biologique...
(source tronches de vin)
Quelques mois plus tôt, le diplodocus du webwine 2.0 (alors que je vous écris à l'heure du web 35.0), le père de La Pipette aux 4 vins nous quittait.
50 ans durant, il a nourri la toile et notre curiosité. On raconte que son trépas fut causé par "une négrette vendéenne de contrebande, qui déboula en contresens face à des tellines garées en double file sur un dentier-test en corne de vache"... "Raharglhhlrglarhhh" furent ses dernières paroles...
(source metrofrance)
Personne ne donnait cher de sa peau, pourtant elle est encore là, "l'Annie Girardot du comptoir", "la Simone Signoret du verre à pied", celle qui a enterré des wagons d'Amy Winehouse, j'ai nommé Sandrine, alias la tenancière de la PinardotheK.
Cette dernière a pris une retraite est désormais une pensionnée active, après avoir gavé le foie de clients ignorants, 45 ans durant.
Des années d'abus liquides qui ont conduit l'ex-égérie de la twittosphère à une démence quasi permanente.
Elle occupe désormais ses journées à couper quotidiennement 0,03 mm de sa frange fatiguée, twittant, entre 07h05 et 18h34, 711 fois de suite : "JE SUIS CAVISTE PUNK AVEC UNE CRÊTE DE SCREWPULL". Elle s'assaisonne désormais le foie au Porto 2068, en souvenir d'un 1968 magique...
(source tronches de vin)
Autre survivante du web du début du siècle, voici Eva (la photo date de cette période). En retrait de la vie publique, elle vit désormais recluse sur les bords de Loire, distillant des conseils pointus en onglerie et en prévention des troubles gastriques.
Sa vue baisse, sa soif de chenin non !! Elle nous a confié ses dernières volontés : 6 applications 3D de chenin (nous sommes en 2075 je vous rappelle), 1 boite d'Imodium biodynamique, de l'acétone estampillé AB, le rouge #58 de chez Kure Bazaar en hologramme permanent...
Une fois par an, elle anime encore le calendrier de l'avin... comme un pied de nez au fantôme-tourmenteur de Bétourné...
(source le Journal de Saone et Loire)
Dernier survivant du "Moyen Âge électronique", David Faria, le Bicéphale-torcheur à lui tout seul.
L'ex-bassiste guitariste musicien de "La Grosse Commission" a lui aussi pris sa retraite. Il officie désormais, en tant que chanteur, dans un petit groupe de quartier baptisé "Fuite Urinaire". La pratique de tout instrument lui est désormais interdite, suite à un accident qui aurait pu lui coûter la vie.
En cause, une palette mal chargée (sûrement volontairement) de vins angolais lui est tombée sur le bras, lors de la FAV 2057 des magasins Brandon Leclerc (oui, oui, c'est toujours la même famille !!).
Accident qui le prive désormais des riffs rageurs, avec lesquels il avait bâti sa réputation depuis l'avènement de son Parkinson. Il boude désormais les GMS, faisant ses courses sur le net, comme tout le monde...
(crédit Rémy Bousquet)
Et votre vieux serviteur dans tout ça ?! Il pense boire quoi avant le grand saut, pour profiter enfin pleinement de sa convention obsèques ?!
(crédit rémy Bousquet)
Comme beaucoup, il voudrait revenir aux sources !!
Celles qui l'ont vu naître, ou pas trop loin !!
Vu son âge désormais canonique, il regoûterait bien un vin, pour le coup presque centenaire :
Les Cailloux 1990 - Cuvée Centenaire - Châteauneuf-du-Pape - André Brunel
65 ans plus tôt, je découvrais ce vin et je notais :
Le vin est aérien, d'une élégance absolue. Ça glisse, la trame est taillée au couteau à sushi !! La dernière fois qu'un Châteauneuf m'a fait cet effet, c'était Brunel. ***(*)/****
Les vignes seront bicentenaires, le vin aura 85 ans, sera sûrement peut-être par terre, comme moi d'ailleurs, nous serons enfin à égalité !!
Je voudrais juste retrouver le souvenir d'une profondeur (peut-être éreintée en 2076), l'écho (à bout de souffle ?!) de l'émotion "vivante" que ce vin m'a donné en ce printemps 2010 !!
Grenache en ossature, syrah et mourvèdre en renforts.
Juste pouvoir caresser du palais, une ultime fois, l'élégance conjuguée d'une vieille dame aux racines séculaires, drapée de galets roulés, fruit d'un terroir et d'un savoir-faire...
PS : big up pour Rémy et ses illustrations !!